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lundi 3 décembre 2012

L'intelligence juridique : une nouvelle approche du droit


baromètre.jpgLe concept d'"intelligence économique" existe déjà, celui d'"intelligence juridique" est en train d'émerger. Il est intéressant pour étudier l'évolution de de l'exercice des professions du droit et à la maîtrise de leur environnement juridique par les opérateurs économiques. Réflexions.

Un nombre croissant d'écrits et d'interventions est consacré à cette nouvelle approche du droit par les entreprises et les collectivités. Pour exemple, l'article rédigé par le Pr Bertrand Warusfel dans le n°43 de la Lettre "Le Monde du droit" que je viens de lire avec intérêt.
L'auteur propose la définition suivante  : "l'intelligence juridique s'entend de l'ensemble des techniques et des moyens permettant à un acteur - privé ou public - de connaître l'environnement juridique dont il est tributaire, d'en identifier et d'en anticiper les risques et les opportunités potentielles, d'agir sur son évolution et de disposer des informations et des droits nécessaires pour pouvoir mettre en oeuvre les instruments juridiques aptes à à réaliser ses objectifs stratégiques".
Le constat. Le constat que peut faire tout avocat ou juriste d'entreprise est le suivant. La plupart des opérateurs économiques, soit ignore le droit, soit le subit. La stratégie la plus suivie est alors celle de subir le moins douloureusement possible le droit. C'est trop souvent lorsque la situation dérape, que les projets vacillent, que les recours sont formés et que le juge est saisi que l'avocat sera saisi en urgence avec pour mission de réussir l'impossible.
Soyons clairs, les opérateurs qui pensent encore le droit qu'en termes de contraintes et qui ne font que le subir disparaîtront dans un contexte marqué par un progrés incroyable de la règle de droit écrite. Il est banal de souligner que les textes se multiplient dans tous les secteurs et évoluent trés vite. En droit de l'environnement, les opérateurs qui ne suivent pas attentivment l'élaboration des textes issus du Grenelle de l'environnement et notamment celle du projet de loi Grenelle qui compte plus d'une centaine d'articles, connaîtront des difficultés certaines
L'environnement juridique des entreprises se caractérise donc tant par sa densité que par son instabilité mais aussi par les opportunités qu'il présente. La maîtrise du droit procure un avantage concurrentiel évident sur les autres acteurs.
La veille juridique. A titre personnel, alors même que je pratique le droit de l'environnement depuis plusieurs années, je dois actualiser mes connaissances, non pas tous les mois mais bien tous les matins. Cette veille juridique est donc indispensable pour tout professionel du droit ce qui suppose d'avoir les bons instruments en termes d'abonnnements aux revues, bases de données informatiques et les notes/consultations rédigées par les juristes. Reste que cette veille juridique ne doit pas être tournée vers le droit existant et ne doit pas se limiter aux seuls textes publiés au JO. Cette veille doit impérativement intégrer la jurisprudence - nationale, internationale et européenne - et les textes en cours d'élaboration. En interne, il ne suffit pas de commander une veille, il faut encore s'interroger sur la manière dont elle sera effectivement exploitée par le service juridique et diffusée dans l'entreprise vers tous le services. Lire les textes ne suffit pas, encore faut-il réfléchir collectivement à la manière des les réceptionner et de les appliquer.
Le risque juridique. Le risque juridique a indéniablement augmenté. Il doit être intégré, anticipé dans tout montage de projet. A titre d'exemple, une entreprise qui se lance aujourd'hui dans des projets de centrales solaires sans analyse du sens et de la portée des textes signés ou à venir en matière d'urbanisme commet une folie. De même, aucun professionnel de l'éolien ne peut se désintéresser des dispositions du projet de loi Grenelle 2 relatives à son activité. Aucun industriel, aucun investisseur ne peut se désintéresser du bouleversement que représente la création de la "trame verte et bleue" etc....
L'intelligence juridique. Une entreprise ne doit pas simplement avoir une connaissance précise et sans cesse actualisée de ses obligations ou des opportunités que lui offre le droit. Elle doit en outre suivre l'évolution des textes et projets de textes pour définir sa stratégie. On entre ici dans le domaine de l'intelligence juridique et ce, du local au global. Il est tout aussi important de surveiller et d'étudier et de suivre l'élaboration des projets de loi, de décrets ou d'arrêtés que de suivre attentivement les procédures de modification ou de révision des documents d'urbanisme ans les territoires où l'on dispose de projets.
Il ne suffit donc pas de connaître le présent du droit, il faut également connaitre le futur du droit. En fonction il faut définir une stratégie d'entreprise. Certaines s'attacheront à la maîtrise de leur environnement juridique pour prévenir le risque juridique. D'autres iront plus loin par le lobbybing et tenteront d'influer sur la rédaction et l'orientation de la règle de droit de manière à ce que cet environnement juridique corresponde à leurs intérêts.
Ce concept modifie sensiblement les conditions de travail, notamment des avocats. Ceux ci ne peuvent plus simplement être de fins connaisseurs et de fins interprêtes de la règle de droit existante. Ils doivent également avoir une parfaite connaissance des processus de décisions, qu'il s'agisse de la procédure parlementaire, des conditions de vote d'une directive communautaire ou du circuit d'élaboration d'un décret ou d'ubn arrêté préfectoral par exemple. Le droit public va cesser d'être considéré avec compassion par ceux qui ne juraient que par le contrat.
Il ne suffit bien sûr pas de connaître le processus de décision. Il faut également en suivre l'activité chaque jour et, pour certains opérateurs, réfléchir aux moyens d'y contribuer. Pour ce faire, les avocats vont aussi devoir apprendre à travailler avec les professionnels de la communication et vice versa.
Les instruments de l'intelligence économique. Le premier instrument est humain. Lorsque cela est possible, une entreprise doit disposer d'un service juridique compétent et placé au centre du circuit de décision interne. Externaliser entière un service juridique n'est pas nécessairement opportun. Le juriste d'entreprise et l'avocat sont à la fois différents et très complémentaire. Le juriste d'entreprise disposera toujours d'une connaissance plus précise des acteurs, des partenaires des forces et des contraintes d'une entreprise dont ne peut bénéficier l'avocat qui ne travaille pas au sein de l'entreprise. L'avocat à l'inverse dispose de la pratique du contentieux. L'avocat qui travaille pour des clients différents peut aussi faire bénéficier ses clients de l'expérience et de l'enseignement acquis dans un autre univers professionnel que le leur.
Au delà, certains instruments matériels sont disponibles :veilles juridiques pro actives, bases de données, formation juridique en interne, notes d'actualité etc....
                                source: http://www.arnaudgossement.com

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